Gustave le farfadet

01 septembre 2006

James Delleck - Antechrist

"Il a compris qu'il était dans un hopital? J'crois pas qu'il ait compris là, parce que apparemment c'est un patient qui a de graves troubles de la personnalité, parce qu'il parle toujours à la première personne du pluriel: nous sommes là, nous ne prendrons pas le traitement, nous... Je sais pas combien ils sont mais apparament il est pas seul."

Ma perception altérée, j'entrevois la porte blanche,
De la cellule capitonnée, il pleut nous sommes dimanche.
Rien ne change, l'autre moi me noie dans des obscures méandres,
Alors je reste constamment dangereux comme la braise sous la cendre.
Encore aujourd'hui, victime de pulsions inouïes,
D'une funeste amabilité j'ai arraché l'oreille du psy.
Par les conduites d'air s'échappe une odeur familière
Qui me plonge dans mon enfance noircie par la colère.
Nouveau-né, j'étais déjà dans divers faits divers,
Dix étages dévalés d'un coup, jeté au vide-ordure par ma mère.
Perturbée, elle dit avoir mis au monde un serpent,
Mais pour notre malheur à tous, je suis vivant.
Maintenant la résonnance macabre des portes métalliques,
Rythme mes jours glauqes comme une vieille devant Derrick.
Alors je vagabonde du regard en état psychotique
Et m'amuse même d'une mouche et de son vol chaotique.
Je me sens comme un instrument désaccordé,
Le mal n'a de cesse de me décharner,
L'oeil hagard, je survis dans ma carcasse livide,
Pendant que l'ombre du silence ébloui mes journées vides.

"Je vois qu'il a été incohérent, donc à l'état de dieu, alors il alterne entre mutisme et imprécations mystiques..."
"Apparemment c'est quelqu'un qui a déjà tué?"
"Semble-t-il, enfin non, pas semble-t-il... Sûr!"

Retenu derrière le mirroir opaque de la démence,
Les neuroleptiques en camisole chimique maintiennent mon errance.
Enfoui dans un corps au réactions plus que brutales,
Je fais et sculpte mon dessin dans la matière fécale.
Même les prêtres de tout bord m'ont innondés de prières,
Mais comme un trou noir j'ai englouti la lumière.
J'essaie d'apprivoiser ce qui me ronge, c'est fou,
Quand je crie à l'aide mon corps ne donne que des coups.
Le démon qui me hante m'a presque remplacé,
Et passe sous silence le peu qu'il me reste de pensée.
Otage et non victime de troubles mentaux,
La science ne conclut qu'à la perturbation des circuits neuronaux.

C'est anormal... Mais quelle formidable impression d'exister en étant la main du mal!
Avez-vous déjà éclaté un oesophage avec une branche,
Ou senti craquer la cage thoracique d'un petit ange,
Ou tout simplement écouter... un poul... ralentir... puis disparaître.
Moi personne ne m'a aimé alors pourquoi devrais-je aimer les autres?
Tous m'appellent l'antechrist mais je ne suis que l'apôtre.
Je crée le deuil en arrachant les vies, demain peut-être la tienne,
Et j'ai les ongles noirs du sang séché par la haine.

"Moi je sais que je peux dire que tous les patients qui sortent d'ici, moi je les considère toujours comme dangereux, on peut pas dire que du jour au lendemain après 6 mois..."
"Ils resteront dangereux même s'ils quittent cette unité?"
"Ben pour moi y a toujours un risque..."
"Ca fait peur ce que vous dites alors... Cette réinsertion du coup elle peut se faire au prix d'une autre victime s'il y a rechute..."
"...C'est vrai que c'est le risque..."